Né à Dakar, Ousmane Mbaye fait ses débuts comme technicien frigoriste, un métier qu’il exercera pendant 17 ans. Aux côtés de son père, artisan du quartier populaire de Soumbédioune, il développe un rapport intime avec le métal. Il apprend à le comprendre, le travailler, le respecter. Ce lien précoce avec la matière brute façonne ce qu’il appelle son “savoir-fer”, une intelligence de la main qui deviendra le socle de sa démarche artistique. Portrait d’un créateur qui transforme le brut en beauté.
Autodidacte, ancien technicien frigoriste, Ousmane Mbaye n’a pas appris le design sur les bancs d’une école, mais dans le fracas des outils et l’héritage silencieux de son père artisan. De la ferraille, il fait de la lumière. De la contrainte, un art. Il utilise des couvercles de fûts, tuyaux galvanisés, bidons… pour en faire des tables, sièges, luminaires ou tabourets aux formes géométriques audacieuses.
Inspiré par l’esprit du Bauhaus, Ousmane Mbaye revendique un apprentissage empirique, fidèle au principe du “Learning by doing” : aucune esquisse préalable, il sculpte à main levée et laisse parler son intuition. Dans ses œuvres, la rigueur du métal rencontre la douceur du geste. Sous ses doigts, la matière se plie jusqu’à devenir presque tactile. Les créations du Sénégalais se distinguent par des lignes épurées, des couleurs vives, un dialogue entre modernisme européen et esthétique africaine.
Installé à la Médina de Dakar, Ousmane Mbaye crée et expose dans son atelier-showroom de Soumbédioune, véritable noyau de son univers. C’est là, au cœur du quartier de son enfance, qu’il façonne ses pièces et coordonne une équipe d’une quinzaine d’ouvriers, notamment ferronniers, soudeurs, finisseurs qui forment un véritable microécosystème autour du design local. Pour lui, le design doit rester enraciné. « Il faut proposer un design qui réponde aux besoins, sans renier notre esthétique », déclare-t-il.

Depuis plusieurs années, Ousmane Mbaye porte le projet ambitieux de création d’une école de design à Dakar. Son objectif est d’offrir une voie aux jeunes non scolarisés en les intégrant à des métiers créatifs porteurs, et contribuer à l’émergence d’un véritable “made in Sénégal”, voire d’un “made in Africa”. Un rêve qu’il finance sur fonds propres, mû par la conviction que la créativité ne doit pas être un luxe, mais un levier d’inclusion.
Son travail a depuis longtemps dépassé les frontières. Dès 2008, ses créations sont exposées au musée Dapper à Paris, puis présentées dans des villes comme Abidjan, Barcelone, Lagos, New York ou encore Hong Kong. En 2024, il est nommé commissaire de la section Design de la 15e Biennale de Dak’Art, une reconnaissance importante. En janvier 2025, il inaugure une nouvelle galerie à Abidjan, qui prolonge encore un peu plus son empreinte au-delà du Sénégal. Ousmane Mbaye met un pont entre artisanat traditionnel et design contemporain africain. Entre Soumbédioune et les grandes scènes internationales, il fait entendre une voix singulière.
À travers ses objets, Ousmane Mbaye raconte l’histoire d’une matière apprivoisée, transformée, mise au service d’un design à la fois beau, utile et porteur de sens. L’artiste sénégalais croit que l’avenir est à un réseau panafricain de créateurs formés localement, mais ouverts sur le monde.