Des ateliers de Mexico aux podiums de Paris, le destin de Nadir Tati ressemble à un roman. La styliste angolaise, qui a habillé la délégation ougandaise aux Jeux olympiques de 2024, est l’une des voix les plus fortes de la mode africaine. Portrait.
Elle rêvait de justice, elle a trouvé sa voie dans la création. Diplômée en criminologie, Nadir Tati est devenue l’icône d’une mode angolaise audacieuse, qui célèbre les femmes et les racines africaines à travers des collections qui voyagent désormais dans le monde entier.
Native de Luanda, Nadir Tati a façonné son savoir-faire loin de son Angola natal. Elle choisit d’abord la criminologie avant de bifurquer vers sa véritable passion. Son destin se dessine au Mexique, où elle apprend les bases du métier dans un atelier de renom.
Pendant deux ans, elle s’imprègne des techniques, perfectionne ses gestes, forge sa vision. Puis vient le coup de chance qui change tout. En 2009, appelée à la dernière minute pour remplacer un créateur sud-africain à la Fashion Week de Cancún, elle conquiert les regards. Sa carrière prend alors son envol.
Si son style séduit, c’est aussi parce qu’il raconte une histoire. L’histoire de l’Angola, meurtri par des décennies de guerre civile, mais surtout l’histoire des femmes qui ont porté ce pays à bout de bras. La créatrice de mode décrit la femme angolaise comme « une combattante, une mère et une femme attentive ». Cet hommage transparaît dans ses collections où elle réinvente le wax, le kente et d’autres motifs traditionnels pour leur donner une touche contemporaine et luxueuse.
Nadir Tati : l’ambassadrice de la mode angolaise sur la scène mondiale
Les robes de la créatrice ougandaise sont reconnaissables à leurs couleurs vibrantes et à leurs textures raffinées et séduisent aussi bien une clientèle locale exigeante que des célébrités internationales. En 2013, elle signe la robe portée par l’actrice congolaise Rachel Mwanza lors de la cérémonie des Oscars. Une consécration pour celle qui veut montrer au monde que l’Afrique peut rivaliser sur le terrain de la haute couture.
Aujourd’hui installée à Luanda, où elle emploie une trentaine de personnes, Nadir Tati poursuit son combat pour professionnaliser le secteur. Ses créations, vendues entre 400 et 5 000 dollars, habillent aussi bien des clientes privées que des délégations sportives nationales. L’Angola lui confie régulièrement cette mission symbolique, comme aux Jeux olympiques de Tokyo 2020 et plus récemment aux Jeux olympiques de Paris 2024, où elle a conçu les tenues des athlètes.
Au-delà de son succès personnel, la styliste milite pour que la mode angolaise devienne un levier de développement économique. Elle rêve de lancer une production à grande échelle, afin que son pays cesse d’importer et devienne lui-même exportateur. « La mode doit faire partie de l’économie et du développement du pays », affirme-t-elle souvent.
En quelques années, Nadir Tati s’est imposée comme une véritable ambassadrice de la culture africaine. Son parcours met encore une fois la lumière sur le potentiel de la création sur le continent, à l’heure où l’UNESCO estime que l’Afrique a « tous les atouts pour devenir un champion mondial du secteur ».
