L’art africain a une fois encore occasionné un événement immémorial. Durant le mois d’avril 2023, la capitale ivoirienne célèbre des expositions à la Rotonde des arts, au MuCAT et à la Fondation Donwahi. Découvrons ensemble ce que réservent ces expositions à Abidjan.
Trois espaces majeurs mettent en lumière les talents africains et leurs utilités pour les populations. Toujours à l’œuvre pour contribuer à la résolution des problèmes sociaux, à travers ses créations, le rôle de l’artiste n’est pas négligé en Afrique. Les regards se tournent vers l’art au cours du mois d’avril 2023, à travers les expositions à Abidjan, notamment à la Rotonde des arts, au MuCAT et à la Fondation Donwahi
Trois sites pour autant d’expositions à Abidjan
01. L’exposition à la Rotonde des arts
La première des expositions à Abidjan, est celle qu’abrite la Rotonde des arts au Plateau. Baptisée, l’exposition L’art dans la cité, elle met en avant le travail de 22 artistes sur les villes africaines. Dans ce célèbre espace reconnu pour la culture à Abidjan, s’installe la Fondation Dapper pour sa première exposition en Côte d’Ivoire. Les expositions de la fondation, spécifiquement dans la salle à l’étage qui accueillait la collection permanente de la galerie, donnent un autre habillement à l’espace.
L’exposition, offerte gratuitement aux visiteurs, présente un décor composé de peintures, photographies, installations, performances vidéo, ou encore de sculptures. Plusieurs installations s’y trouvent et ont pour but de permettre à ces visiteurs de découvrir le regard que les artistes portent sur les questions liées à l’urbanisation, aux changements climatiques et à la résilience.
Ainsi, parmi les artistes abrités par la Rotonde des arts, figure Nobukho Nqaba. Dans une salle entière, la Sud-Africaine a marqué son empreinte. Les visiteurs peuvent être accueillis par des objets comme des meubles de sacs Tati de couleur bleue, rouge, gris et blancs. Ces outils sont, pour l’artiste, des moyens de réflexion sur l’émigration et l’exode rural des populations à la recherche d’une vie meilleure.
Pour elle, ces sacs sont utilisés pour transporter l’essentiel pour la survie. Nobukho Nqaba a aussi représenté ces objets nécessaires, par un lit, une étagère contenant un peu de vaisselle, une bible, que peuvent remarquer les visiteurs. À travers les différentes représentations, elle attire les attentions sur les espoirs parfois déçus de ces migrants et leurs efforts pour se faire une place dans un nouvel environnement, tout en conservant des éléments de leur identité.
L’exposition à Abidjan de Nobukho Nqaba une fois dépassée, les visiteurs tombent sur une autre créature. Celle de la malienne Fatim Diarra. Sa photographie de couleurs vives, nommée « La Femme de Yougouyougou », n’est pas du reste. Malgré la simplicité qu’elle laisse paraître, l’ouvrage est à la quête des connaissances sur la condition de l’Afrique vis-à-vis de l’occident. Le tableau montre « une femme posée sur une pile de friperies très colorées. L’artiste interroge la surconsommation et la pollution par l’industrie de la mode qui déverse chaque année des tonnes de vêtements de seconde main sur le continent, et plus précisément sur sa ville, Bamako », a-t-elle confié à nos confrères de Jeune Afrique.
La salle de la Rotonde des arts abrite aussi les œuvres d’autres artistes plasticiens. Notamment, les Ivoiriens Aristide Kouamé et Mounou Désiré Koffi, ainsi que le Béninois Prince Toffa. Ceux-ci font découvrir une autre dimension artistique par des objets recyclés (de vieux claviers d’ordinateurs, téléphones portables hors d’usage, canettes, déchets plastiques). Ces créateurs circoncisent leurs chefs-d’œuvre sur les questions environnementales et l’économie circulaire.
Faire passer des messages à travers des objets abandonnés, le domaine de prédilection de l’artiste Aristide Kouamé. Après sa formation aux Beaux-Arts d’Abidjan, par Pascal Konan, il trouve du plaisir à faire des portraits par les tongs en plastique rejetées par l’océan. De l’autre côté, les expositions expriment un sentiment de résilience que dégagent les ouvrages. Pour sa part, la série du photojournaliste John Wessels, montrant les inondations de 2022 à Dakar, en disent mieux. Elle fait voyager les spectateurs vers des scènes de vie quotidienne et l’adaptation malgré l’adversité en mêlant difficultés et optimisme.
« Je ne voulais pas donner uniquement une image des difficultés, mais aussi transmettre l’optimisme. C’est un exemple pour tous, dans le monde entier, qui nous invite à trouver des solutions et à continuer d’avancer », explique la commissaire de l’exposition Aude Leveau Mac Elhone. La photographie est accompagnée de galeries attrayantes. Notamment la galerie Cécile Fakhoury à Abidjan et la galerie Number 8 à Bruxelles.
02. L’exposition au MuCAT
Le second site d’expositions à Abidjan, est celui réservé au Musée des cultures contemporaines Adama Tounkara (MuCAT). Situé dans le quartier populaire d’Abobo, l’espace culturel accueille l’art autrement du 1er au 23 avril 2023. L’exposition « Autrement » de l’artiste australien Peter T. McCarty est l’hôte du lieu.
Sa création débute en 2020, lorsqu’il reçoit un don de fermetures Éclair d’une ONG dans le cadre d’un programme de formation à des activités génératrices de revenus. Inspiré par l’aspect et l’utilité, l’artiste se sert des pouvoirs de ces fermetures, pour servir sa société. « J’ai été frappé par leurs couleurs vives et par l’ironie qu’elles représentaient : les fermetures à glissière ne sont de couleurs vives que pour se fondre dans d’autres tissus et disparaître. Elles sont censées être des serviteurs invisibles qui maintiennent l’objet ou le vêtement ensemble. Je n’ai pas pu résister à l’envie de jouer avec cette dualité », a-t-il détaillé.
Lors de la crise politique de la Côte d’Ivoire en 2022, Peter T. McCarthy se sert de ces dons comme outil d’exhortation aux dirigeants. Il les assemble pour créer un Kita, un pagne royal dans la culture Akan, à travers lequel il appelle les dirigeants à l’humilité.
Ensuite, il poursuit ces créations dans le même contexte du pouvoir. Il crée une collection à l’histoire de la princesse Yennenga, à celle des pharaons d’Égypte, avec comme thème central, la masculinité. Ses œuvres ont plusieurs fois représenté la Côte d’Ivoire lors d’événements internationaux, tels que le Contextile, une biennale internationale de l’art textile contemporain au Portugal en 2022 et a été sélectionné pour le Loewe Craft prize dont l’exposition a eu lieu en Corée du Sud la même année.
03. Les expositions à la Fondation Donwahi
Le dernier site d’expositions à Abidjan en ce mois d’avril fait découvrir les œuvres du célèbre artiste Antoni Clavé. Après son passage à la biennale de Venise en 2022, l’artiste pose cette fois-ci, ses valises à Abidjan, à la Fondation Donwahi. Peintre, sculpteur, graveur, l’artiste espagnol fait découvrir aux visiteurs, une vingtaine d’œuvres. Datant de 1913, les créations du contemporain et expérimenté Antoni Clavé sont parfois difficiles à cerner. Les œuvres qu’il présente sur le thème du guerrier depuis 1958, laissent paraître ces multiples expériences.
Assemblage de plusieurs notions comme celui du textile, de la peinture de bâtiment, de l’illustration et de la conception d’affiches de cinéma, l’art de l’ami de Pablo Picasso suscite de nombreuses interrogations de la part des visiteurs aux expositions. Comme c’est le cas de « Souvenir d’un masque africain », une réinterprétation d’un masque dogon avec des assemblages de matériaux divers.
Cette exposition qui a rendu la Fondation Donwahi vivable, tente également de faire le parallèle entre la guerre d’Espagne, qui a marqué l’artiste et l’a poussé à quitter son pays pour la France, et les crises politiques que la Côte d’Ivoire a traversées.
Enfin, pour la commissaire d’exposition Aude Leveau Mac Elhone, la thématique de l’exposition est accrocheur et permet d’attirer un public éclectique, composé autant de professionnels du monde de l’art que de personnes qui ne fréquentent pas habituellement ces lieux.